Déclaration interreligieuse sur la coopération entre la science et la religion pour les soins de l’environnement

Déclaration de Torreciudad

Cette déclaration fait suite aux discussions menées lors du séminaire international sur le thème ‘Science and Religion Cooperation for Environmental Care’ (http://www.issrec.org/) les 20 et 21 juin 2016 à Torreciudad (Espagne). Ce séminaire, inspiré par la publication en 2015, de l’encyclique Laudato si’ du Pape François, a regroupé des participants d’horizons divers: scientifiques, théologiens et responsables religieux des principales traditions spirituelles. Nous ouvrons cette déclaration à quiconque reconnaît la réalité des problèmes environnementaux et la nécessité de favoriser une plus grande coopération entre les sciences et les grandes traditions religieuses et spirituelles, afin d’y trouver des solutions.

1. Une grande majorité d’êtres humains sur cette planète croient en l’importance des traditions religieuses et spirituelles dans leur vie quotidienne. Ces traditions constituent une source valide d’inspiration et une fondation pour les valeurs éthiques, ainsi qu’une vision cosmologique sur la façon dont nous sommes en relation avec le Divin, la Terre et nos frères humains. Comme le dit l’encyclique « Laudato si’ » : « Ceci doit inciter les religions à dialoguer entre elles afin de protéger la nature, de défendre les démunis, et de construire une trame de respect et de fraternité » (n.201). Les autres responsables religieux ont, de façon similaire, indiqué l’importance de la coopération entre les principales traditions religieuses et spirituelles face aux problèmes environnementaux. Des déclarations interreligieuses ont été émises au cours des années récentes, insistant sur le fait que la dégradation de la nature n’est pas seulement un problème économique ou technique, mais un problème moral et spirituel. Parmi ces textes, il y a la déclaration conjointe du Pape Jean-Paul II et du patriarche Bartholomée Ier, le manifeste interreligieux de Uppsala en 2008 sur le changement climatique, et les déclarations musulmanes et bouddhistes de 2015 sur le même thème. Cependant des actions plus fermes sont nécessaires pour faire évoluer notre modèle économique et social actuel vers un modèle qui prenne soin de l’environnement.

2. La science joue un rôle important par sa compréhension des problèmes environnementaux et des tendances ainsi que l’évaluation des évolutions futures. La dégradation de l’environnement est générale, à la fois en termes de zones et de domaines concernés. Le changement climatique, la pollution de l’eau et de l’air, l’acidification des océans et la diminution de la biodiversité doivent être traités par une approche multi-disciplinaire, impliquant non seulement les sciences de la planète mais aussi les sciences humaines et sociales. Une collaboration rapprochée entre ces disciplines est essentielle pour une vision plus large des défis environnementaux que nous devons affronter et des synergies complexes entre eux. Comme le dit l’encyclique du Pape François, « une spécialisation conduit à un certain isolement et l’absolutisation de son propre champ de connaissance. Cela nous empêche de faire face aux problèmes environnementaux de façon effective » (« Laudato si’ », n.201).

3. La science seule ne peut pas résoudre la crise environnementale actuelle. Une coopération renforcée avec tous les acteurs influençant les attitudes et les décisions liées à l’environnement est nécessaire, y compris les structures politiques, les organisations non-gouvernementales et les entreprises privées. Les traditions spirituelles et religieuses sont la source et l’inspiration la plus anciennes des valeurs morales. Elles nous enseignent un respect profond de la terre, notre demeure commune. Elles nous incitent à vivre en paix et en harmonie. Les valeurs spirituelles et culturelles nous permettent d’éviter l’hyperconsommation, qui est un facteur déterminant de la dégradation environnementale.

Elles nous incitent à cultiver des vertus et à faire preuve de compassion entre nos frères humains, les animaux, les plantes, le sol et les océans. Pour toutes ces raisons, une coopération plus étroite entre les scientifiques et les responsables religieux est nécessaire, en vue de favoriser une conscience environnementale et une action en ce domaine.

4. Les communautés religieuses et spirituelles jouent un rôle important dans l’éducation partout dans le monde, particulièrement des jeunes. Il est donc essentiel que les responsables de ces communautés – dans toutes les religions et à tous les niveaux -, comprennent les problèmes environnementaux, et favorisent « une conversion écologique », ce qui signifie modifier des styles de vie contraires au développement durable. Créer ce changement radical ne veut pas simplement dire donner plus d’attention aux questions environnementales ou réduire superficiellement notre consommation. Il implique … « une façon particulière de voir les choses, une façon de penser, des politiques, un programme éducatif, un mode de vie et une spiritualité qui génèrent ensemble une résistance face au paradigme technocratique » (« Laudato si’ », n. 111). Les institutions religieuses, telles que les écoles, les paroisses, les temples, les mosquées, les madrasas, les synagogues et les monastères, devraient s’engager plus activement à être des gardiens responsables de la Terre, au lieu de ses destructeurs.

5. La gravité des problèmes environnementaux et les tendances actuelles constituent un risque sérieux pour l’habitabilité de notre planète. Les observations scientifiques ont démontré l’échelle et la gravité des impacts de l’activité humaine dans de nombreux processus naturels. Nous sommes la cause principale du changement climatique, avec potentiellement des conséquences catastrophiques sur les systèmes naturels et la société. Nous causons des extinctions massives d’espèces, que – pour la plupart – nous n’avons même pas encore été en mesure de nommer. Nous polluons l’air et des eaux, nous perturbons les écosystèmes, nous démantelons les forêts et nous détruisons des sols fertiles. En conséquence, les personnes les plus vulnérables tels que les pauvres, les marginalisés et les exclus, en souffrent déjà intensément les conséquences. Les problèmes affectant les processus environnementaux et sociaux ont les mêmes racines et devraient être abordés simultanément : « Les stratégies menant à une solution exigent une approche complète de lutte contre la pauvreté, de restauration de la dignité aux exclus, et en même temps de protection de la nature » (« Laudato si’ », n. 139). Nous dépendons des systèmes terrestres pour la sauvegarde de cette planète, notre maison pour les générations actuelles et futures. Cependant, comme le Pape le souligne : «… Il ne suffit pas de considérer les différentes espèces simplement comme de potentielles ressources à exploiter, en négligeant le fait qu’elles ont une valeur en elles-mêmes. Chaque année voit la disparition de milliers d’espèces végétales et animales que nous ne connaîtrons jamais, que nos enfants ne verront jamais, parce qu’elles ont été perdues à jamais » (« Laudato  si’ », n. 33 »).

6. Il est urgent de renverser les tendances les plus menaçantes aboutissant à la destruction de l’environnement. Il nous faut encourager un nouveau modèle de progrès, qui combine l’écologie humaine et naturelle, qui favorise des énergies propres, qui promeuve des économies durables. Un progrès qui se concentre sur les valeurs essentielles au lieu de nous mener à un consumérisme absurde (moins est plus), et qui nous fait vivre plus heureux, dans un souci des autres humains, des autres êtres vivants et de nos habitats. Nous avons besoin que la Science et la Religion travaillent ensemble pour que ce changement se produise.

Sanctuaire de Torreciudad, 21 juin 2016

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